40 EN MÉDITERRANÉE n’y a pas bien longtemps, la critique historique professait une défiance profonde à l’égard des pieux récits du martyrologe, de toute cette floraison de légendes dont la fantaisie des hagiographes avait, pour l’édification des fidèles, paré la vie des saints. Ruinart, au xvne siècle déjà, jugeait indispensable de faire dans l’énorme recueil des Bollandistes un choix attentif et sévère, et sa prudence ne retenait, parmi tant de pièces suspectes, qu’un très petit nombre de documents pour sa collection des Acta sincera; Tillemont ne montrait guère moins de réserve à l’égard de ces textes tant de fois remaniés et interpolés par le zèle inconsidéré des amplificateurs ; et les scrupules de ces grands savants semblaient plus que légitimes; et sans doute il est incontestable que, tels qu’ils nous sont parvenus, la plupart de ces écrits ne paraissent guère mériter de créance. Or voici qu’il faut aujourd’hui reconnaître que« ces documents négligés ou discrédités peuvent, comme l’a très bien dit M. Le Blant, fournir aux études historiques des éléments d’information qu’on aurait tort de dédaigner »; et ç’a été précisément la merveille des récentes découvertes de l’archéologie d’apporter plus d’une fois à ces Actes des Martyrs, où l’on ne voulait voir que d’édifiants romans, une confirmation inattendue et éclatante. Certes on doit avouer que bien des traits légendaires sont venus, au cours des siècles, s’ajouter au fond primitif de ces récits, que bien des élucubrations ridicules sont venues les embellir et les déformer; il n’en est pas moins vrai que dans les textes les plus altérés en apparence, les plus dédaignés par la critique, des parcelles de vérité se cachent, que les monuments révèlent et garantissent en quelque manière par leur témoignage. Ces martyrs, dont jadis