VILLES MORTES D’ORIENT 245 portions heureuses et de sveltesse1. » Peu à peu, pourtant, par l’efïet des relations constantes que Chypre entretenait avec le midi de la France et en particulier avec la cour pontificale d’Avignon, d’autres influences, vers la seconde moitié du xive siècle, supplantèrent celle de la Champagne : les écoles de Languedoc et de Provence trouvèrent en Chypre des imitateurs; les portails de Saint-Nicolas de Famagouste rappellent la cathédrale de Béziers et Saint-Jean d’Aix : et à Famagouste encore, les belles églises de Saints-Pierre-et-Paul, de Saint-Georges des Grecs, de Sainte-Anne, qui datent du xive siècle, appartiennent à l’art gothique du sud de la France. Sans doute, avec le xve siècle, qui marque la fin de l’art gothique en Chypre, tous les styles se confondent, le style flamboyant de la Catalogne et le style vénitien; sans doute l’art byzantin mélange alors curieusement à l’appareil gothique et à la sculpture latine ses coupoles et ses voûtes. Et, sans doute aussi, bien avant ces efforts, parfois pittoresques, d’une époque de décadence, l’Orient avait mis sa marque sur ces édifices de l’Occident : des terrasses couronnent le haut des constructions, arrêtant l’épanouissement de la floraison gothique; l’ornementation, plus réglée et plus sévère, emprunte à la faune et à la flore spéciales du pays beaucoup de ses motifs décoratifs. Mais les formes générales sont latines; et si, en quelques détails, les architectes de Chypre, comme ceux de Rhodes, se sont plu à innover — ainsi en ces porte-bannières qui font, aux jours de fête, flotter sur le couronnement des palais et des églises une mouvante forêt d’étendard — leurs voûtes sont aussi légères, aussi solides, aussi 1. Enlart, loc. cit., p. 70S»