54 EN MÉDITERRANÉE garantir contre toute violation la sépulture qui leur appartenait; aussi, et tout particulièrement dans les nécropoles à ciel ouvert, les épitaphes multiplient les prières et les menaces contre quiconque oserait troubler le repos du mort par le contact sacrilège d’un corps étranger. Généralement des amendes fort lourdes, au profit de la ville ou de l’État, punissaient le profanateur. Or, à partir de la fin du rv® siècle, les inscriptions de Manastirine spécifient que ces amendes seront payées à « la sainte et catholique église » de Salone. Il y a lieu de conclure de ce fait qu’à ce moment le cimetière était devenu la propriété de la communauté chrétienne, et que dans la première moitié du iv° siècle les possesseurs du terrain sanctifié par la présence des martyrs en avaient fait généreusement don à l’autorité ecclésiastique. Désormais la grande nécropole prit officiellement, ainsi que l’indique une inscription de l’année 382, le nom de « cimetière des adorateurs de la sainte loi chrétienne » ou plus simplement de « cimetière de la sainte loi chrétienne » (cœmeterium legis sanclæ chrislianæ). Il est facile de se représenter, tel qu’il était alors, l’emplacement aujourd’hui désolé de Manastirine. Parmi les sarcophages et les pompeux mausolées groupés autour des blanches chapelles des martyrs, des arbres touffus, ombrageant les tombes, faisaient du cimetière un vaste jardin verdoyant, « un paradis », suivant une expression chère aux premiers chrétiens. Daus les cryptes où reposaient les saints, devant leurs sarcophages, des flammes brûlaient dans de grands luminaires de pierre, et la piété des fidèles répandait sur leurs tombeaux les aromates et les fleurs. « De violettes et de feuillages, dit en de beaux vers un