202 EN MÉDITERRANÉE approche, l’impression se précise : ce n’est plus ici le vieux couvent féodal, aux murailles pittoresques et croulantes, paré de donjons crénelés et d’inutiles remparts ; ces énormes bâtisses neuves, aux façades toutes modernes, ont moins l’aspect d’un cloître que d’une vaste caserne. Et c’est une armée en effet qui l’habite, une armée de huit ou neuf cents moines, armée disciplinée, docile, qu’on sent soumise à une autorité toute-puissante. Et nous-mêmes, à peine débarqués, nous sommes en quelque façon saisis par cette discipline toute militaire : on nous masse, on nous range, presque par fdes, et le long des rampes qui de la mer montent au monastère, entre deux haies noires de moines, pro-cessionnellement on nous conduit. A la porto principale, l’archimandrite — fine et intelligente figure — nous attend très grave, entouré des hauts dignitaires du couvent; et tandis que les présentations se font et que les compliments de bienvenue s’échangent — avec des gestes d’autant plus cordiaux que nous savons mal le russe et nos hôtes moins encore le français, — les cloches sonnent à toute volée à tous les clochers du monastère; et dans ce bruissement de sons, grêles ou sonores, qui semblent tomber de partout et nous enveloppent d’une vibrante harmonie, lentement, derrière l’archimandrite, nous montons à l’église, et assis dans les stalles du chœur, sous les grands lustres de cuivre ornés d’aigles byzantines, devant l’iconostase surchargé de dorures, nous assistons à un office solennel. Puis, à travers une cour charmante, où le jet d’eau de la fontaine sainte met son frais murmure, on nous mène au réfectoire, et d’étage en étage, à une autre église encore, où d’autres chants religieux nous saluent, ces chanta russes d’une si simple et si puissante beauté, et par le