266 EN MÉDITERRANÉE dresse au centre de l’édifice, derrière la grille de fer forgé qui date du temps des croisades, le rocher brut, sommet du mont Moria, qui, dans cet édifice musulman, évoque brusquement les plus lointains souvenirs de l’histoire d’Israël et fait sortir de la brume légendaire qui les enveloppe les temps mômes de Salomon. Nulle part mieux qu’en cet édifice, l’un des monuments les plus authentiques qui se rencontrent à Jérusalem, on ne sent plus profondément le charme pénétrant de l’Islam ; et sous la mystérieuse obscurité des voûtes comme dans la grande clarté de la cour déserte, volontiers, sur cette esplanade sacrée qui fut tant de fois le théâtre des résistances suprêmes, sur cette terre arrosée de tant de carnages, on s’oublie à rêver longuement de paix et de tranquillité. Pendant que les derniers rayons du soleil font étinceler les claires faïences et dorent les coupoles de la mosquée d’Omar, nous descendons au pied de l’enceinte sacrée, dans l’étroit couloir qui s’ouvre entre des masures délabrées et la puissante muraille du Haram es Chérif. Là se trouve ce mur des Lamentations, où chaque vendredi les Juifs viennent pleurer sur la destruction de Jérusalem. Comme c’est le temps de la nouvelle année Israélite, c’est fête aujourd’hui, et il y a foule. Riches et pauvres, Juifs d’Espagne, d’Allemagne ou de Pologne, se pressent sous le haut rempart aux assises colossales, les uns en costumes somptueux, vêtus de ces grands caftans de velours aux couleurs éclatantes que bordent de larges fourrures, les autres en guenilles, en oripeaux sordides, tous mêlés et confondus. Et tous, le front incliné contre le mur. pleurent sur la ruine de