LA SAINTE-MONTAGNE DE L’ATHOS 201 pondérance dans le monastère; et chaque jour, entre eux et les Grecs, le conflit se faisait plus aigu. Une chose pourtant manquait encore aux Russes ; ils n’avaient pu installer un des leurs dans la haute dignité d’higoumène : ils le tentèrent en 1870 et de haute lutte s’efforcèrent de conquérir le gouvernement du couvent. Vainement la Sainte-Montagne s’émut; vainement une commission chargée de régler le différend décida qu’à l’avenir l’abbé serait toujours un Grec, ordonna que les Russes ne pourraient former plus d’un tiers de la population du monastère. Tout fut inutile. Les Russes interjetèrent appel à Constantinople, et le patriarche œcuménique, quoi qu’il en eût, dut reconnaître en 1875 qu’ils avaient pour eux le droit historique et la force des services rendus. Leur candidat, élu à nouveau, prit possession de la charge d’higoumène, et depuis lors, malgré des luttes ardentes et la résistance désespérée des Grecs, Rossikon est tombé pleinement entre leurs mains. Et sans doute il ne faudrait pas croire, comme le racontent volontiers les journaux d’Orient et même d’Occident, que le grand monastère russe n’est autre chose qu’une caserne et que des armes très perfectionnées se dissimulent à l’abri de ses murailles ; officiellement même, le gouvernement du tsar n’exerce sur lui qu’une lointaine et fort diserète protection. Mais l’affluence annuelle des pèlerins russes à l’Athos, les dons largement distribués par la piété des fidèles suffisent à entretenir et à accroître son prestige et sa richesse. Et rien qu’à le voir de loin, étageant au flanc de la colline »l’énorme masse de ses grands bâtiments blancs, que domine une forêt de coupoles rouges et vertes, on devine qu’il y alà une force avec laauelle il faut compter. A mesure qu’on