204 EN MÉDITERRANÉE lasser, leur ambition tenace et grandissante donne l’assaut aux positions des Grecs. Sans parler des couvents slaves, qui volontiers inclinent vers les Russes, d’ailleurs encore leur viennent des alliés. Depuis que les Grecs ont chassé d’Iviron les moines d’origine géorgienne, un skite de religieux du Caucase, c’est-à-dire de sujets russes, s’est fondé à côté du vieux couvent. Aux portes de Lavra un skite roumain existe ; et tous deux poursuivent activement contre les Grecs la reconnaissance de leur autonomie. Contre ces usurpations, l’élément hellène se défend, fort de ses droits acquis, de ses traditions anciennes, de la supériorité numérique qu’il possède encore. Et pourtant, dès maintenant on peut entrevoir ce qu’il adviendra un jour de cette lutte inégale. Les Russes ont pour eux l’activité, l’énergie, l’argent, peut-être aussi la supériorité intellectuelle; ils finiront par avoir le nombre. Et alors, malgré leur résistance désespérée, la défaite des Grecs est à la longue certaine, et un jour viendra où à eux aussi on dira, comme dans Molière : La maison est à moi; c’est à vous d’en sortir. Et c’est là ce qui donne une sympathie secrète, malgré leurs faiblesses ou leurs ignorances, pour ces moines grecs qui firent jadis la grandeur de l’Athoset qui sont les vaincus de demain ; c’est ce qui inspire un intérêt tendre pour ces vieux monastères grecs qui furent aux siècles passés des asiles de science, de piété et d’art, et qui nous ont fidèlement conservé, en ce temps où tout se nivelle et se banalise, l’originale et vivante image d’une civilisation qui ne fut ni sans éclat ni sans gloire.