80 èn Méditerranée dit parfois en Dalmatie; on ne fait rien pour nous. » Il y a sans doute quelque excès et quelque injustice dans ce reproche : on comprend pourtant comment, entre Venise qui ne lit rien pour elle et l’Autriche qui ne fit guère, la reconnaissance des populations est naturellement allée à ces Français qui les premiers leur ont apporté la civilisation. Certes, dans les institutions françaises transportées sur le littoral adriatique, tout n’a point reçu ni mérité un favorable accueil : la conscription a paru lourde, la politique suivie à l'égard du clergé a semblé, en ce pays très catholique, inutilement tracassièrc et déplaisante. Mais on a reconnu le sentiment dont s’inspiraient les réformes, le sincère désir qui les traversait d’améliorer la condition des sujets, et voilà pourquoi, dans l’ensemble, la France a laissé un inoubliable souvenir. Marmont affirme quelque part que, pour gagner les Dalmates, il suffisait de savoir se faire bien venir des dames. Je ne sais ce qu’il faut penser de cette boutade de vert-galant : en tout cas, le duc de Raguse s’est préoccupé de s’assurer d’autres titres, et plus sérieux, à la reconnaissance de la Dalmatie. Aujourd’hui encore —• chose significative — la route monumentale qui de Knin à Raguse traverse du nord au sud la province, porte officiellement le nom de route Marmont ; la citadelle qui s’élève au-dessus de Knin s’appelle le fort Marmont, et dans la Dalmatie entière il n’est ville ni village qui n’ait sa rue ou sa place Marmont. Bien plus, dans l’imagination du peuple, obscurément conscient des immenses bienfaits qu’il lui doit, Marmont a grandi aux proportions d’un héros de légende, d’un héros bienfaisant et fort, changeant d’un coup de baguette magique la face de la contrée. César dans les Gaules, Trajan en Pan-