VILLES MORTES D’ORIENT 259 brer encore la défaite de • la chrétienté et l’irrésistible puissance de l’Islam. Certes, dans cet Orient où tant de peuples ont passé, dans cet Orient de Syrie surtout auquel appartiennent Chypre et Rhodes, bien d’autres souvenirs peuvent solliciter et retenir l’attention. A Jérusalem, dans l’enceinte du Haram es Cherif, devant cette pierre brute, sommet du mont Moriah, qu’encercle aujourd’hui la mosquée d’Omar et qu’enfermait jadis le temple de Salomon, l’esprit s’en va naturellement vers cette grande histoire du peuple d’Israël, qui semble ici sortir de sa brume légendaire pour devenir presque tangible. Dans les colossales constructions de Baalbek et de Palmyre revivent, avec la mémoire des grandeurs romaines, toutes les étranges splendeurs du paganisme oriental. Ailleurs, dans les idylliques paysages de la Galilée, dans le décor morne et désolé de Jérusalem, les pieux souvenirs du christianisme naissant ont laissé leur trace, tendre et tragique tour à tour; et ailleurs c’est l’infinie séduction qu’exercent les prestiges merveilleux de l’art arabe. Sans doute toutes ces choses valent qu’on y prenne intérêt : il en est peu pourtant de plus émouvantes que ces monuments de l’Orient latin qui, à Chypre comme à Rhodes, dans les châteaux de Syrie comme dans les forteresses féodales de la lointaine terre d’outre Jourdain, rappellent tant de pages glorieuses de notre histoire. Gesta Dei per Francos, disait-on jadis en parlant des croisades : et c’est la France en effet qu’on retrouve dans les maisons ileurdelysées de la rue des Chevaliers comme dans les cathédrales gothiques de Nicosie ou de Famagouste. Témoins muets des gloires disparues, elles restent, dans cet Orient qui fut si longtemps une colonie fran-