LES FOUILLES DE SALONE 61 l'antique église ruinée, silencieuse et déserte depuis plus de douze siècles, de nouveau, pour un jour, la foule so pressa autour de l’autel relevé sur la confession des martyrs ; de nouveau, pour un jour, le chant pieux des cantiques éveilla les échos endormis du vénérable cimetière; et, à voir les arcs de verdure dressés à l’entrée de l’édifice, les guirlandes de fleurs qui paraient l'autel et encadraient les saintes images, le flottement des bannières inclinées, les spirales do l’encens montant lentement dans le ciel, à voir surtout le concours des populations accourues de tous les villages d’alentour, l’attitude recueillie et grave, la simple et touchante piété des assistants, vraiment on eût pu se croire revenu à quelqu’une de ces fêtes de la primitive Église, où, sur les tombes de leurs morts, les chrétiens célébraient la gloire de leur Dieu. Si j’en crois les souvenirs de ceux qui ont eu la bonne fortune d’assister à cette cérémonie vraiment unique, ce fut un rare et incomparable spectacle queceluide cette sortede résurrection qui, aux froids enseignements de l’archéologie, aux leçons abstraites de l’histoire, substituait une réalité palpable et saisissante, qui faisait, pour quelques instants, renaître de la séculaire poussière des ruines l’âme même de la vieille Salone disparue. J’ai eu jadis, aux catacombes romaines, l’honneur d’assister parfois, à côté du maître éminent qui a fondé la science des antiquités chrétiennes, à ces pieux offices qui, aux jours dos grandes fêtes, se célèbrent dans les cryptes dos cimetières de Sainte-Agnès, de Domitille ou de Calliste, et j’ai senti profondément la puissance demotion qui s’en dégage, ce charme exquis, presque fantastique, que Bourget a si bien exprimé dans quelques belles pages de son roman de Cosmopolis. Dans les longues