64 EN MÉDITERRANÉE qui rappellent les fiords Scandinaves, lacs fermes où les hautes montagnes viennent baigner dans les flots leurs pentes verdoyantes, et qui évoquent des paysages alpestres, une Suisse enfin, comme on l’a dit, mais une Suisse que la mer borde et que dore le soleil d’Orient. A l’artiste, à l’historien, de petites villes obscures et charmantes, Zara, Sebenico, Trau, Spalato, Raguse, offrent, avec la riche série de leurs monuments, les souvenirs d’un passé qui fut glorieux, cités mortes qu’illumine encore un reflet des splendeurs vénitiennes et des gloires romaines. Et enfin pour le voyageur français ce pays présente un intérêt de plus : aux âpres rochers de la Dalmatie est demeuré accroché un lambeau de l’épopée napoléonienne et de la courte période où elle fut terre française, la Dalmatie ; — chose rare, unique peut-être dans l’Europe actuelle — a gardé un inoubliable et reconnaissant souvenir. I On sait comment, le 2(3 décembre 1805, le traité de Presbourg enleva à l’Autriche la Dalmatie, jadis vénitienne, et la donna à la France. Ce qu’on sait moins, c’est l’attention passionnée que Napoléon porta à sa nouvelle conquête, l’active sollicitude qu’il marqua à ce pays qu'il ne vit jamais. C’était le moment où l’ambition impériale embrassait l’Orient dans ses rêves. Dans la pensée de Napoléon, la Dalmatie, voisine de la Bosnio, de l’Albanie, de la Grèce, porte ouverte sur le Balkan, était une position d’importance essentielle; elle le devint davantage encore quand le traité de Tilsitt eut noué cette première et éphémère alliance fraïuo-