LES FOUILLES DE DELPHES 173 fière, d’une si grave et si sereine majesté : et l’on ne sait vraiment, en face de ce chef-d’œuvre authentique, ce qu’il faut louer davantage, la perfection de l’art du bronzier qui a fondu cette incomparable figure, l’exquise patine verdâtre qui anime la statue de chatoyants reflets, l’eurythmie des longues draperies tombantes, la grâce simple et forte de la pose, l’admirable vigueur du modelé, le charme sérieux de l’expression où l’émail des yeux met un éclair de vie, et la jeunesse surtout qui respire dans cette œuvre unique. Et sans doute cette exquise figure d’éphèbe n’est qu’un morceau, seul conservé d’un ensemble plus important. Des fragments de char et de chevaux retrouvés tout auprès de YAurige montrent qu’en sa forme première l’ex-voto comprenait un quadrige sur lequel était debout le conducteur du char, et qu’accostaient une ou deux figures d’enfants qui tenaient par la bride les chevaux extérieurs. En quelles circonstances, en quel temps fut consacrée cette offrande, souvenir d’une victoire remportée à Pytho? une inscription gravée sur la base en fait honneur à Polyzalos, frère puîné des tyrans de Syracuse Gélon et Iliéron ; et quoiqu’il sub siste quelques obscurités sur les raisons qui, dans cette dédicace, on fait marteler puis regraver en surcharge le nom du donateur, un fait incontestable ressort de ce texte : c’est la date du monument, que les limites chronologiques, comprises entre 482 et 472, font ainsi un peu postérieur aux métopes du trésor des Athéniens, un peu antérieur aux sculptures des frontons d’Olympie. Faut-il maintenant, dans le personnage représenté, reconnaître, comme d’abord on l’a voulu faire, le grand seigneur propriétaire des chevaux victorieux, Gélon ou Hiéron? Si séduisante que soit l’hypothèse, elle ne sau-