EMPEREURS ET IMPÉRATRICES D’ORIENT 207 La hiérarchie civile de Byzance s’appelait la sainte hiérarchie. L’empereur conférait une fonction ou une dignité comme il eût administré un sacrement : « Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, ma majesté, qui me vient de Dieu, te crée patrice ». Pour recevoir ce sacrement administratif, il fallait être en état de grâce, prêt à communier, et avoir la crainte du Seigneur. A Byzance, l’état de grâce aurait été l’état normal des consciences d’employés. Les lois se promulguaient au nom du « Seigneur Jésus-Christ, notre maître ». En tête du code Justi-nien, à la place où dans nos codes modernes se trouverait l’exposé des principes, il n’est question que de la Trinité, de la foi catholique et des interdictions portées contre l’hérésie. L’existence que l’étiquette byzantine imposait à l’empereur était vraiment une vie pontificale, pour emprunter une expression de Christine de Pisan à propos de la cour de Charles V. Son costume civil rappelait celui des prêtres; dessous, une longue chlamyde blanche qui est l’aube de notre clergé; par-dessus, une sorte de longue chasuble couvrant les épaules et les bras, étincelante d’or et de pierreries, rigide et pesante comme une chape. La couronne, surmontée de la croix, est presque la tiare du patriarche et des métropolites de l’Église orientale; de cette couronne descendent, le long des deux joues, les praependulia, pendeloques ou rivières de diamants et de pierreries qui se rejoignent sous le menton. Le Basileus, ainsi accoutré, ne montre presque pas de visage, presque pas de mains, presque pas de chair, comme la Théotokos et les saints des icônes, dont l’image est cachée sous une croûte