178 ÉTUDES SUR L HISTOIRE BYZANTINE au mot Rex. Ce titre avait fini, à Byzance, par prendre la place de ceux d'Imperator, de Princeps et de Cae-sar qu’avaient portés les chefs du haut-empire, mais dont aucun ne répondait plus à la réalité. Bien que la substitution de ce vocable aux anciens suffirait à indiquer qu’une profonde révolution politique et ethnographique s’était accomplie, que l’État byzantin était autre chose que la continuation de l’État romain, que le commandement avait passé d’une race à une autre, du peuple conquérant du monde au plus cultivé des peuples conquis. A la vérité, celui-ci avait oublié son ancien nom : les Byzantins se donnaient â eux-mêmes le nom de Bomains; et ils réservaient celui A'Hellènes à leurs ancêtres païens et même aux païens de toute catégorie qui pouvaient encore se rencontrer dans le monde, par exemple aux Slaves idolâtres du Péloponèse. Au fond, ce nom de Romains leur convenait encore mieux que celui d’Hellènes, car la population de l’empire était loin d’être toute hellénique. Tout au plus si les Grecs de race y formaient la majorité; sans parler des thèmes ou provinces de langue italienne, la péninsule des Balkans était à moitié slave; celle d’Asie Mineure était à moitié arménienne, arabe ou turque. Or ce qui faisait le lien entre tous ces peuples, c’est que tous professaient la même religion que l’empereur, s'efforcaient, sans toujours y parvenir, de parler la même langue, voyaient en lui l’héritier des Césars de l’ancienne Rome. L’empire byzantin n’était pas l'expression politique d'une nation; il était une création artificielle, gouvernant vingt nationalités différentes et les réunissant dans cette formule : un seul maître, une seule foi. Il s'enorgueillissait d'une