L’HIPPODROME a CONSTANTINOPLE 59 desquelles des moines excentriques avaient élu domicile ; il a demandé des renseignements sur leurs bas-reliefs aux Grécules ignorants, qui lui répondaient invariablement que c’étaient les signes de ce qui devait arriver un jour; enfin le hasard de ses investigations l'a conduit à l’hippodrome, et il ne peut contenir son admiration à la vue de tant de chefs-d’œuvre de bronze et de marbre, de ces tribunes « moult cointes et moult nobles, où l’empereur et l’impératrice se séaient quand on jouait, » de ces « ymages d’hommes et de femmes, et de chevaux et de bœufs, et de chameaux et de ours, et de lions et de moult manières de bestes jectées en cuivre qui estaient si bien faictes et si naturellement formées, qu’il n’y a si bon maistre en païenisme ne en crestienté qui sût faire aussi bien ». Ses compagnons d’armes, après la seconde prise de Constantinople, ne se laissèrent point attarder par ces nobles considérations; ils brûlèrent, démolirent, renversèrent, jetèrent à la fournaise, firent des sols avec l’admirable Hélène dont Nicétas était amoureux. L’hippodrome, déshonoré par l’invasion et le pillage, cessa d’être pour les Grecs, même après la chute de l’empire latin, le théâtre de leurs plaisirs et de leurs rivalités. Il semble qu’ils aient commencé à fuir ce monument, qui ne faisait que leur rappeler le triomphe abhorré des hérétiques et des barbares. Cent ans avant la conquête de Constantinople par les Ottomans, l’hippodrome était en ruines : une estampe du xive siècle en fait foi. Ce dessin, inexact dans les détails, assez vrai dans l’ensemble, nôus montre encore debout les colonnes de la spina et le palais de la tribune; mais les gradins se sont en