220 ÉTUDES SUR L'HISTOIRE BYZANTINE ou le revirement de l’opinion publique le portèrent à rappeler Irène et môme Staurakios. Les affaires n’en allèrent pas mieux : les Bulgares furent encore vainqueurs; les quatre oncles paternels du jeune empereur conspirèrent et eurent les yeux crevés ou la langue coupée; les Arméniaques, qui naguère lui avaient rendu le pouvoir, se soulevèrent contre le rappel de Staurakios; il fît aveugler leur chef et répudia sa femme Maria, suspecte d’avoir pris part aux menées de ses compatriotes. Un second mariage, avec une certaine Théodote, cubiculaire ou femme de chambre d’Irène, amena une nouvelle brouille avec sa mère. Celle-ci se jeta dans le parti des mécontents, distribua de l’argent et provoqua une révolution qui renversa son fils. Pour mieux prendre ses sûretés contre le prince détrôné, elle employa le moyen qui était classique à Byzance et que l’influence grecque avait fait adopter dans la Gaule carolingienne : 011 lui creva les yeux. L’opération se fit avec tant de barbarie qu’il en mourut1. Irène règne de nouveau, et, ce que l’on n’avait pas encore vu à Byzance, ce n’est pas au nom d’un mari ou d’un fils, comme Pulchérie ou Martina, c’est en son propre nom. Elle n’est plus impératrice, mais empereur, comme Marie-Thérèse fut le roi des Magyars. Ses Novelles portent comme en-tête : « Irène, grand Basileus et Autocrator des Romains ». De nouveau le pouvoir est délégué à des eunuques, Staurakios et Aétius. Le règne de cette princesse usurpatrice, souillée du sang de son fils, ne fut pas [1. Il semble au contraire que Constantin VI survécut et acheva sa vie dans l’obscurité.]