HELLÈNES ET BULGARES AU X« SIÈCLE 279 allaient se décharger aux quais mômes de Constantinople, à l’endroit dénommé « entrepôts bulgares ». Une intrigue d’eunuques impériaux, gagnés par deux marchands grecs furieux de la concurrence des barbares, fit transporter les « entrepôts » à Salonique : les vaisseaux de Siméon avaient donc à franchir le détroit des Dardanelles, à contourner deux presqu’îles, celle de Gallipoli et celle de Chal-cidique, pour aller débarquer leurs marchandises à Salonique, où d’ailleurs ils furent bientôt en butte à d’autres avanies. Siméon fît entendre des protestations qui ne furent point écoutées. En plein xe siècle, l’Orient put assister à une guerre de commerce provoquée par une lutte de tarifs. Siméon poursuivit cette guerre avec toute la férocité asiatique, dévastant la Thrace, enlevant des milliers de captifs et renvoyant ses prisonniers de guerre avec le nez coupé (888). Pour se défendre, l’empereur Léon VI, dit le Sage (le savant), eut recours à un expédient terrible : l’appel contre ces demi-barbares à de purs barbares, aux Magyars, qui erraient encore dans les steppes du Nord. Presque dans le même temps, le roi de Germanie, Arnulf, les appelait contre la Grande Moravie et Léon VI contre la Grande Bulgarie (893). L’ouragan des cavaliers ougriens passa, rejetant les Moraves sur les montagnes de Bohème, les Bulgares sur la rive méridionale du Danube, détruisant pour jamais le contact et la cohésion entre les races slaves du Nord et celles du Sud, pour dévaster ensuite l’empire grec aussi bien que l’empire allemand. Ce recours à des sauvages, païens °u fétichistes, contre le peuple orthodoxe des Bulgares, Léon VI a cherché à le justifier ensuite dans