MICHEL PSELLOS 169 dérangée et qui se prétend dépouillé d’un petit monastère par des ennemis acharnés. Cher et illustre ami! je ne sais si ce pauvre et désespéré moinillon possède réellement là-bas un monastère ou un bout de champ ; mais voyant qu’il a une langue plus large que son immeuble imaginaire et qu’il se croit poursuivi par l’outrage et l’injustice, je le recommande à ton tribunal. Qu’il trouve justice auprès de toi, non parce qu’il est pauvre, mais parce qu’il se dit dépouillé. Si tu découvres que le monastère, les moines, les envieux, les oppresseurs et tout le reste n’est qu’une fantasmagorie et une fiction de théâtre, alors arrange-lui une justice de théâtre; ordonne à tes huissiers de faire comparaître ses insultcurs imaginaires, fais une enquête de comédie et que tout le procès soit comme une fiction dramatique. Mais s’il possède vraiment quelque masure, fais-lui bonne et sérieuse justice1. Ailleurs, pour peser sur les résolutions d’un collègue, il lui montre les solliciteurs installés chez lui, vivant à ses dépens, dévorant sa maison, et le menace plaisamment de le faire contribuer à cette charité forcée. Tel est le tour habituel de son esprit : souvent une émotion réelle se dissimule sous un spirituel badinage. Il y a de l'humour chez ce Byzantin. Citons encore cette lettre où il recommande un nouveau fonctionnaire à la surveillance de ses supérieurs : Mon cher chambellan ! le sous-préfet que je t’envoie est un jeune poulain novice au joug et qu’on attelle pour la première fois au char des affaires. Il a besoin d’un cocher habile et expérimenté pour l’introduire dans la carrière et lui faire doubler la terrasse de l’hippodrome; il n’est point encore habitué à la course publique, il craint les montées et 1. Sathas, Bibliotheca, t. V, p. 367, lettre 119.