MICHEL PSELLOS 151 satires. Le moine Jacob lui décocha un quatrain où il le comparait à Jupiter tonitruant qui n’a pu supporter le séjour de l’Olympe, parce qu’il n’y retrouvait plus ses belles déesses. Sur le terrain de la polémique et des invectives, Psellos se trouvait à l’aise : môme dans le genre populacier il ne le cédait à personne. Il répondit par une longue satire, dans laquelle, avec cette irrévérencieuse familiarité des choses saintes qu’autorisait la libre piété du moyen âge, il parodiait le canon de la messe. Chaque verset commençait par une des lettres de cette devise : Je chanterai cet ivrogne de père Jacob. C’était un acrostiche en prose. De cet hymne rabelaisien je citerai quelques couplets. Jacob, insatiable animal! ni la flamme ardente qu’aucune pompe ne peut éteindre, ni l’incendie déchainé, ni les sables brûlants, n’ont une soif égale h la tienne; comme la mer, comme l’enfer, tu ne peux emplir ton estomac embrasé. — Le créateur a pu combler les abîmes, inonder d’eau les cavités de la mer; mais ton vaste estomac, ô mon père, Dieu même ne saurait le combler; tu es comme un tonneau percé, toujours rempli et toujours vide. — Tu tombes à la renverse sur ta couche, tu as la poitrine nue, le cou nu, les jambes nues jusqu’au ventre, et tu bois sans mesure. Tu bois canoniquement, père Jacob. Ton corps même exhale les vapeurs du vin. — Revêts la peau de panthère, agite le thyrse, invoque Bacchus et crie : Evohé! Nous couronnerons de pampres ton front, père Jacob, vieux Silène. Nous pendrons des grappes à tes oreilles, nous ferons à ton cou un collier d’outres pleines de vin1. 1. Sathas, Bibliotheca, t. V, p. 177.