72 CRUCIFIÉS AU CARREFOUR rées russes qui lui ont donné le formidable dynamisme destructif. Comme nous le savons déjà, la révolution russe a jeté par terre le «superédifice », a liquidé la société féodale et bourgeoise dont les fragments ont été dispersés à l’étranger; et maintenant, la table rase à laquelle les bolchevistes sont arrivés par l’élimination de la bourgeoisie, ils veulent l’utiliser pour poursuivre et même dépasser l’expérience de Pierre le Grand et de tout le régime tzariste : à laide du socialisme, ils essaient d’atteindre, sinon de dépasser, le niveau de l’Occident. Les pays de l’Europe centrale entre la mer Baltique, l’Adriatique et la mer Egée, sont tous, à l’exception de la Tchécoslovaquie, des pays où la bourgeoisie, hypnotisée par le snobisme de la noblesse (la « gentry », les « boïards » ou la « chlyachta »), a construit un édifice social fragile qui s’élève très haut au-dessus des niasses paysannes qui croupissent dans l’ignorance et dans la misère. C’est pourquoi dans tous ces pays se pose aujourd’hui le problème le plus actuel, le plus grave, celui du rapport entre la ville et les campagnes. Et tous ces pays sont, après la Russie, les plus sérieux candidats à une révolution sociale contre laquelle ils n’opposent que les murailles des dictatures. En Hongrie, cette révolution avait déjà éclaté en amenant au pouvoir le bolcheviste Béla Kun. Grâce à l’intervention armée des étrangers, la révolution sociale en Hongrie a été maîtrisée, mais pour combien de temps?