28 CRUCIFIÉS AU CARREFOUR mis de se pourvoir de toutes les institutions urbanistes et de tout le confort moderne, de se donner grand air mais de devenir aussi la pépinière de la corruption morale au Sud slave. A Zagreb, la fête battait son plein au moment où tout le pays était plongé dans la détresse, où les campagnes yougoslaves payaient au moloch de la guerre le plus formidable tribut de sang qu’on ait jamais vu. Dans le domaine politique, comme nous l’avons déjà dit, cette Zagreb enrichie n’a entrepris aucune action de quelque envergure pour la cause de la libération et de l’unité yougoslaves. Il est vrai que, dans son for intérieur, elle avait adhéré à la cause des Alliés contre les empires centraux : elle se réjouissait à chaque victoire de l’Entente et à toute défaite ou difficulté des empires allemands; peut-être sa résistance passive a-t-elle gêné quelque peu l’Autriche dans la conduite de la guerre. Mais dans la lutte active contre l’Autriche, Zagreb a moins participé que les autres provinces yougoslaves de la monarchie. Les Serbes de la Bosnie-Herzégovine, de Voïvodine, de Srem, de Lika et de Dalmatie ont apporté à la lutte pour la libération nationale des dizaines de milliers de volontaires, ont donné de nombreux martyrs exécutés ou morts dans les camps de concentration. Les Croates de Dalmatie, de l’Istrie, du littoral croate, ainsi que les Slovènes ont donné une bonne partie de leur jeunesse intellectuelle nationale révolutionnaire aux corps de volontaires yougoslaves en Russie et sur le front de