VOULOIR RÉCOLTER SANS AVOIR SEMÉ 33 ses aspirations! Zagreb avait devant elle tout le mois de novembre 1918 pour procéder à l’organisation de son pouvoir sur les provinces yougoslaves qui avaient appartenu à l’Autriche; elle a essayé de le faire, mais elle a piteusement échoué : lors de la fameuse mobilisation décrétée par le Conseil National de Zagreb, personne n’a répondu à l’appel; le pays était en pleine anarchie, les jacqueries qui éclatèrent un peu partout, soutenues par une véritable armée de déserteurs autrichiens (« le cadre vert») et encouragées par la propagande bolcheyiste, menaçaient de produire une décomposition sociale complète; de l’ouest et du sud-ouest, l’armée italienne avançait sans rencontrer de résistance et occupait tout le territoire qu’elle convoitait. Dans ce chaos complet, dû à la révolution sociale qui commençait et à l’invasion étrangère, Zagreb a brillé par son impuissance totale pour toute action utile, se bornant à un verbalisme stérile. Rien de plus naturel qu’à cet instant dramatique, lorsque l’avenir national était en péril, tous les Yougoslaves austro-hon-grois, la plupart des Croates et des Slovènes aussi bien que les Serbes, se soient tournés instinctivement vers Belgrade et lui aient demandé de les sauver de l’anarchie, de la révolution siociale et de l’invasion étrangère. Leur instinct ne les avait pas trompés. Ils trouvèrent le salut, car Belgrade bien que durement éprouvée par la guerre, possédait toujours les éléments essentiels d’un pouvoir organisé, et, avant tout, son armée solidement encadrée,