184 CRUCIFIÉS AU CARREFOUR mais cette crise, en se greffant, a donné au problème des rapports serbo-croates l’acuité, la sensibilité maladive qu’il n’avait jamais atteintes auparavant. Seuls les hommes dont les affaires marchent toujours et qui mangent à leur faim, peuvent mettre au premier plan la question serbo-croate. Ces hommes ne sont pas touchés par la crise, mais 99 % de la population yougoslave n’est pas dans leur cas. Donner, en Yougoslavie, la primauté aux questions politiques sur les questions économiques, c’est le fait d’une catégorie d’hommes politiques qui, par leur formation, n’ont aucun sens pour les problèmes économiques et sociaux. Malheureusement, beaucoup d’hommes politiques yougoslaves sont à ranger dans cette catégorie : ce sont des égoïstes qui, en dehors de leur personne, ne voient rien; ou bien des hommes qui sont imbus d’un romantisme politique, encore vivace en Yougoslavie car, en cela aussi, on peut le dire, la Yougoslavie est plus près de la queue que de la tête de l’Occident européen. Nombreux sont les hommes politiques yougoslaves, surtout ceux de l’opposition au régime personnel, qui croient très sincèrement qu’une solution correcte de la question constitutionnelle est la baguette magique avec laquelle on guérirait immédiatement la Yougoslavie de sa crise économique, sociale et morale. Lorsqu’ils proposent l’établissement du dualisme et du fédéralisme, ils croient, et veulent persuader les autres, que le dualisme et le fédéralisme seraient une panacée pour tou-