LES DEUX CROATIE 49 a toujours été un monde tout à fait à part, qui n’avait rien de commun avec la Croatie populaire. Déjà au Xe siècle, cette Croatie des seigneurs est tombée sous l’influence des villes latines de Dalmatie, s’est séparée de son peuple et, dans son immense majorité, a embrassé avec enthousiasme la cause du catholicisme romain et du féodalisme occidental, ce qui l’amena à fraterniser avec les Hongrois et à chercher l’appui des Allemands. Pendant des siècles entiers, elle n’a vu dans son propre peuple que des êtres inférieurs qui ne méritaient que le mépris et qui n’étaient bon qu’à être exploités. Ces sentiments envers le peuple croate, son attachement à la Rome catholique, son snobisme quasi paneuropéen et sa mégalomanie, la noblesse croate les a légués plus tard à la bourgeoisie croate. Celle-ci à continué à singer l’Occident bien qu’en réalité, par son développement intellectuel, elle ait été loin : elle ne faisait que courir après l’Europe, s’efforçant désespérément de s’accrocher à ses jupes mais n’y arrivant jamais! La Croatie féodale et bourgeoise, plus que tout autre, a fait sien le principe « tu felix Croatia, nube » ( « Marie-toi, heureuse Croatie » !). Quand la Hongrie conquit la Croatie (en 1097), les féodaux croates s’efforcèrent de transformer cette conquête en un mariage légal entre « la petite mère » Croatie et la Hongrie des Arpades. Après l’extinction des Arpa-des, ils l’amenèrent dans le lit nuptial des Anjou de Naples dont le dernier, Ladislas,