LE DANGER DES JANISSAIRES MODERNES 81 pays danubiens, on s’est aperçu depuis longtemps que, selon la conception fasciste, la chute de la monarchie austro-hongroise donne à l’Italie le droit moral ou, tout au moins, une possibilité matérielle de recueillir, à titre d’héritage, l’impérialisme autrichien : la politique contenue dans la formule « de Prague à Odessa » porte en effet sur les mêmes pays et poursuit tous les buts de l'impérialisme autrichien. Conduit par sa grande expérience et par son instinct d’homme d’Etat, Nicolas Pachitch a parfaitement bien compris que l’Italie fasciste représente le plus grand péril pour le jeune Etat yougoslave. Et afin d’écarter ce péril, il a pensé qu’il lui suffirait de ne pas trop s’engager dans le sillon de la politique française, de ne pas « attacher le petit canot yougoslave au grand vaisseau français », et de rechercher la bienveillance et même l’amitié de l’Italie fasciste en lui faisant des concessions territoriales et économiques. C’est ainsi qu’on en arriva au pacte d’amitié de Rome, en janvier 1924 et aux conventions de Nettuno (1925) qui livrèrent à l’Italie l’Etat libre de Fiume qui avait été créé par le traité de Rapallo (1920). De ces conventions, certaines stipulations sacrifiaient à l’Italie l’indépendance économique de toute la partie nord-ouest de la Yougoslavie. Mais bientôt les rapports avec l’Italie changèrent radicalement, et sans aucune faute de la part de la Yougoslavie. Pachitch, si expérimenté et si clairvoyant qu’il fut, n’avait pas entièrement