ET DE VIEILLE SERBIE 295 La situation des propriétaires et des paysans est intolérable. Le spéculateur qui afferme la dîme arrive trop souvent à la fixer arbitrairement et sans appel. Il la perçoit sans contrôle. Il faut, jusqu’à ce qu’il passe, laisser la moisson dans le champ. Quand le dîmier tarde, les épis pourrissent ou s’égrènent, sous les yeux du paysan impuissant, qui doit encore s’estimer bien heureux quand le dîmier n’exige pas en argent ce qu’il dit lui être dû. Les autres impôts étaient jadis demandés à la municipalité, qui les répartissait librement entre ses membres solidairement responsables, et les percevait. Aujourd’hui, c’est l’individu qui doit l’impôt (1). Le gendarme turc s’installe au village. Il y exige « bon souper, bon gîte... et le reste » . Souvent, il prend l’argent sans vouloir donner de reçu, ou bien, il remet au contribuable — en langue turque — une déclaration vide de sens ou grotesque. Il perçoit ensuite une deuxième fois. — Telle est une des seules réformes sérieuses qui aient été vraiment réalisées, une réforme à rebours. (i) 11 va sans dire que, si les avantages de l’ancienne solidarité fiscale ont été supprimés, les inconvénients en subsistent : pour quitter le pays, il faut pouvoir fournir des garants, qui sont responsables du paiement régulier de l’impôt, non seulement par l'émigrant, mais aussi par ses descendants nés à l’étranger. Si une famille s’éteint après avoir passé la frontière, les Turcs trouvent toujours que la preuve des décès est insuffisante. Les garants sont tenus à perpétuité sur leur propre patrimoine.