298 QUESTION DE MACÉDOINE tant. C’est bien la rançon, avec la franchise et un certain courage en moins. La justice ne présente aucune garantie. Sous le voile des principes dont on fait montre à l’usage de l’Europe, les juges sont nommés par le vali parmi les hommes d’affaires de sa clientèle. Les faux témoins musulmans sont devenus une institution. Les prisons sont abjectes. La question n’est pas aussi abolie qu’on s’efforce de le faire croire. Ni la propriété, ni l’honneur, ni la vie des raïas ne sont garantis contre la fantaisie et la convoitise des fonctionnaires du Grand Turc et de leurs amis. C’est en étudiant la Turquie qu’on comprend bien la vieille maxime romaine : Jus privatum sub tutela juris publia latet. Dans un pareil milieu, les résistances, les vengeances et les décisions désespérées sont fatales. Celui-ci a à venger sa femme, sa fille, sa sœur; celui-là, sentant sa vie en danger, et traqué, s’est enfni; cet autre a eu son champ confisqué; cet autre était à bout : il a pris son fusil et a gagné la montagne. Les outlaws se retrouvent. Ils forment des bandes, — comme jadis, plus au nord, les haïdouks. Les cadres de la révolution sont ainsi constitués par l’Empire ottoman lui-même. Et il y a plus encore que ce que je viens d’indiquer. Les musulmans s’inquiètent des progrès que font les chrétiens.