LA THÉORIE DE LA DISLOCATION 17 la plaine danubienne. Ils se heurtèrent aux Allemands. Ils errèrent quelques années encore. Puis ils se fixèrent, à perpétuité sur les territoires qu’ils occupent aujourd’hui. Leur âme vagabonde se fixa et fut prise de cet amour immense pour la terre de la patrie que Vôrôsmarty (1) traduisit dans ses strophes enthousiastes : À ta patrie, ô Hongrois, demeure éternellement fidèle : aujourd’hui elle te nourrit; quand la mort te frappera, elle te recouvrira de son gazon touffu. Pour toi dans le vaste univers, il n’est pas d’autre asile. Que ta destinée sur ce sol soit bénie ou maudite, c’est ici qu il faut vivre, c’est ici qu’il faut mourir. L’État hongrois n’a pris que très récemment un caractère de nationalisme magyar prononcé. Longtemps la noblesse magyare accusa les rois, qui refusaient de trop favoriser les vainqueurs au détriment des vaincus, d’être les « rois des étrangers « . A la différence d’un vieux chroniqueur tchèque qui écrivait « là où il n’y a qu’une langue, là est la gloire >> , le roi Étienne engageait son fds à bien traiter les étrangers et à respecter leurs langues : nam unius linguoe uniusejue moris regnum imbecille est, (1) Avant la grande lutte de 1848, Vorosmarty Mihay (Mihay, Michel) — « artiste scrupuleux et délicat, plutôt que génie inspiré, écrit M. Saint-René Taillandier,... intelligence grave et studieuse, poète des académies » — contribua comme l’etœfi, à qui il ressemble pourtant si peu, à éduquer sa nation. 2