172 LA GUERRE ET L’ITALIE l’abandonner. « Tous les Italiens tremblaient que la tiare ne passât à ceux d’outre-monts, au grand détriment et déshonneur de l’Italie », disait déjà une chronique florentine après l’élection de Pie II contre le cardinal d’Estouteville. C’est un sentiment qui n’a pas cessé d’habiter le cœur des Italiens. Il n’a fait que croître avec l’état d’esprit nationaliste et impérialiste de l’Italie contemporaine, avec le développement d’une grande politique italienne dans le bassin de la Méditerranée et en Orient. Nous arrivions à Rome à l’heure où venait de paraître en France la conversation de M. Latapie avec le pape, un des « coups de pistolet » les plus retentissants que jamais journaliste ait tiré. Nous avions lu ce document, avec les commentaires qu’y ajoutait la presse italienne, entre Florence et Rome. Et nous nous attendions à trouver la ville, au lendemain de ses manifestations de mai, émue de nouveau, peut-être soulevée... Un mot surtout nous frappait, parmi les propos que M. Latapie attribuait, à Benoît XV : celui de « neutralité ». Au moment où les « neutralistes » venaient de passer pour de mauvais Italiens, quelques jours après que les plus notoires d’entre eux avaient été pourchassés à travers les rues de Rome, ne fallait-il pas craindre qu’une équi-