QUIRINAL ET VATICAN 163 en immense majorité, ignorent presque tout de l’étranger, de l’aspect vrai de la planète. Ils sont entrés dans une des plus vastes guerres de l’his-toire avec une; représentation du monde d'une dangereuse fausseté. Journaux, public, diplomatie, ne se sont pas trompés seulement sur la Turquie, sur la Bulgarie, sur la Grèce. C'est sur nos ennemis principaux qu’on a divagué. Sur la force vraie de l'Allemagne, sur la capacité de résistance de l'Autriche elle-même, on avait fait de fausses spéculations. On est parti en commettant d’énormes erreurs de calcul parce qu’on vivait sur des préjugés et des poncifs, loin de la réalité. Il n’est pas jusqu’à nos alliés qu’on n’ait méconnus, le caractère de leurs institutions considérées par rapport à l'état de guerre, la nature du concours qu'ils étaient capables d'apporter, qu'on n'ait mal appréciés. Une vue sentimentale de la politique dominait, tandis qu’à cette conception l’Allemagne opposait l'expérience des hommes et des choses, son réalisme, l’usage inflexible de la force. Mais, en même temps, et par un contraste qui achevait de nous désarmer, de mettre en déroute les intelligences, tout ce qui, dans l’élite française, se réclamait de l'esprit pratique dédaignait, rejetait — à bien peu d’exceptions près, — les idées générales, prétendait ne retenir