LE MOIS HISTORIQUE DE L ITALIE (MAI 1915) 2">3 à celles que Brutus et Antoine prononcent sur le forum, dans le Jules César de Shakespeare. On évoque, en effet, en lisant ces pages, les jours les plus tumultueux que, dans sa longue histoire, ait traversés la Ville éternelle. « Compagnons, s’écriait le poète, ce n’est plus le temps de parler mais d'agir; ce n'est plus le temps des discours mais des actes, et des actes romains. « Si l’on regarde comme un crime le fait d’inviter les citoyens à la violence, je me vanterai de ce crime, je le prendrai sur moi seul... « Ecoutez-moi. Entendez-moi. La trahison aujourd’hui est manifeste. Nous n’en respirons pas seulement l’horrible odeur : nous en sentons déjà tout le poids ignominieux. La trahison s’accompiit à Rome, dans la cité de l’âme, dans la cité de vie ! Dans notre Rome, on tente d’étrangler la Patrie avec une corde prussienne... C’est à Rome que s’accomplit cet assassinat. Et si je suis le premier à le crier, et si je suis le seul, demain vous me tiendrez compte de ce courage. Mais peu m’importe !... « Ecoutez. Nous sommes sur le point d’être vendus comme un vil troupeau. Sur notre dignité humaine, sur la dignité de chacun de nous, sur le front de chacun de nous, sur le mien comme sur le vôtre, comme sur celui de vos fils, sur celui de vos enfants à naître, il y a la menace d’une marque servile. S’appeler Italien, ce sera porter un nom qui fera rougir, un nom qui fera se cacher de honte, un nom qui brûlera les lèvres. » Il n’est pas difficile d’imaginer l’effet que des paroles aussi enflammées devaient exercer sur