PAYSAGES CROATES LES LACS DE PLIVITZÉ 41 A Don Lapatch, nous campons dans la cour d’une ferme, sous un noyer, près d’un gros chien enchaîné au tronc de l’arbre. Il a partagé notre dîner, il a dormi toute la nuit sous la voiture. C’est une de ces amitiés que j’ai laissées sur la route, avec une mélancolie de vagabond. Au matin, l’escalade du Vélébit nous mène sur les hauts plateaux d’Udbina. Ils sont d’une harmonie grandiose qui ne peut s’enfermer dans l’analyse verbale. Ici, la ligne, la couleur, la lumière, les lointains, forment un ensemble à la fois sauvage et classique que j’ai vainement tenté de traduire. Il y a dans quelques toiles de Poussin de ces grands espaces construits comme une architecture incommensurable et de ces collines où le géant Polyphème s’accoude à des sommets transparents. Il en est ainsi jusqu’à Plotchka et Svéti-Kok où la montagne se déchire tout à coup sur un infini d’arêtes calcaires, de fjords indigo, d’îles en dérive sur une mer soyeuse : la Dalmatie.