L'ITINÉRAIRE DE YOUGOSLAVIE tant son personnage, homme ou femme, et flanqué de seaux, de bidons et de torbas multicolores. Quelques hommes ont la kapa de la région : un tout petit calot, en forme de galette, noir ou rouge vif, posé sur le devant du crâne et maintenu par un cordon qui se noue sous l’occiput; ou un autre calot, un peu plus élevé, dont les bords plats sont en laine noire, crépue comme l’astrakan. Mais la plupart ont des casquettes ou des chapeaux de feutre, les mêmes qu’on voit à Shanghaï, à Sydney, à Buenos-Ayres, à Lisbonne... On arrive à Split sans la voir, enfouie derrière les collines d’une presqu’île, et l’on débouche dans cette cité romaine par un quartier de garages et de jardins publics. L’arrivée est beaucoup plus belle par mer, comme dans tous les ports, n’est-ce pas. Elle révèle d’un seul coup cette grande ville claire, étalée sur un fond de montagnes grisâtres qui font ressortir sa carnation. La rive est encombrée de tartanes dont les poupes s’ouvrent sur le quai et forment des étalages de fruits et de légumes, marché nautique que je n’ai vu nulle part ailleurs. La promenade des Français aligne ses pal-miers-ananas de Côte d’Azur. A l’un des bouts, une place, Marmontov Trg (en souvenir de notre duc de Raguse, général de Napoléon) ouvre son quadrilatère qui veut imiter les Procuraties de Venise. A l’autre bout se dresse la haute façade plaquée de colonnes de la Stari Grad, la ville ancienne, bâtie dans les ruines d’un palais de l’empire romain. Elle occupe un cinquième à peu près, de la ville actuelle, qui n’est pas grand’chose à côté de cet extraordinaire phénomène de végétation historique. On sait comment Dioclétien, s’étant retiré des affaires après fortune faite, avait fait bâtir ce palais, non loin de sa ville natale, pour y finir ses jours en cultivant des légumes. Je n’invente rien. Chez ces aventuriers de