280 L’iïlNÉRAIRE DE YOUGOSLAVIE qui n’est rien, Bos Novi qui n’est pas grand’chose, à travers une campagne si française qu’on s’étonne d’y rencontrer des femmes drapées dans le dzar et des hommes en turban. De grands troupeaux d’oies encombrent la route et tiennent tête à notre machine en nous criant des injures. Et tout à coup apparaît une ville sans minarets, sans maisons de bois, sans dzars, sans turbans, avec un clocher compliqué, des bâtisses blanches à plusieurs étages. Nous venons d’entrer en Croatie. La ville, exclusivement catholique, s’appelle Kostaïnitza. En même temps s’ouvre la grande plaine de la Save, qui s’étend jusqu’à Zagreb. Terre fertile et monotone, sans une saillie, campagne d’une province riche où les blés et les hommes poussent vigoureusement. La route, la plus mauvaise de tout le pays, trous, bosses, gadoue, traverse des villages de couleurs heureuses, maisons de bois couvertes de motifs populaires en bleu et rouge, escaliers ouvragés, toits de vieilles tuiles, derrière des palissades de planches verticales, comme dans la Vieille Serbie. Les femmes montrent des rudiments du splendide costume croate, robe de toile blanche, brodée de grandes fleurs rouges ou multicolores. Au travail elles le recouvrent de tabliers et de caracos industriels. Ce n’est pas le labeur somptueux de la Serbie du Sud. Mais que vienne le dimanche ou qu’elles aillent à la ville, et elles s’épanouissent comme des bouquets de roses rouges.