236 L’ITINÉRAIRE DE YOUGOSLAVIE 1918, les deux provinces se libéraient de l’Autriche pour faire partie de la Yougoslavie. Voilà pourquoi les fillettes sont blondes, et pourquoi les bergers qui achètent des flûtes de bois sont blonds comme elles. Dans cette boutique où nous a conduits le type-qui-parle-français, ils essaient des flûtes, ce qui fait une bien jolie musique. Les unes, qui sont plates, ont deux tuyaux taillés dans un seul morceau de bois, et l’on donne l’accompagnement en faisant glisser les lèvres sur l’embouchure de gauche; les autres, qui sont rondes, sont faites d’un petit bâton creux, orné d’anneaux en fil de laiton : elles ont un son plus aigrelet que les premières qui font penser à la peine de Tristan devant la mer. Et maintenant, quand je veux me rappeler les hauts plateaux de la Bosnie, très exactement, avec leurs arbres, leurs prairies, leurs fleurs, et l’odeur de la verdure, et l’odeur des fleurs, et le bruit de la pluie sur l’herbe et sur les feuilles, et l’odeur de la pluie, et le bêlement des troupeaux, et l’odeur des troupeaux, je n’ai qu’à emboucher la flûte double et en tirer la petite musique des bergers. Car tout le long du chemin, en montant la côte aux cent virages qui mène à Sémetch, à travers de sombres forêts de sapins, j’ai laissé conduire Marie-.Teanne afin de m’exercer à cette musique. Là-haut, nous avons débouché dans une grande clairière et nous avons arrêté la voiture au milieu d’une prairie. Il pleuvait doucement sur l’herbe et sur les fleurs. Et j’étais bien content, car j’avais attrapé la mélodie. Et je la jouais de tout mon cœur, pendant que Marie-Jeanne me regardait avec un petit sourire aussi joli que la chanson. Et je voudrais bien que l’on me crût lorsque je dis que tous les moutons des alentours venaient lentement vers ma musique et se mettaient à