VI DE ZARA A TROGHIR ampagne française entre Benkovatz et Skradîn, cul- tures, vergers, vignobles. La Dalmatie est faite de ces contrastes. Skradîn, petite ville rose et gris-rose, enchâssée par un fjord d’un bleu de voyage de noce, s’enfonce dans la vallée pendant qu’on escalade une colline minérale, bossuée de chênes rabougris. Trois kilomètres plus loin nous abandonnons la route de Chibénik et nous nous laissons descendre, à gauche, vers les chutes de la Krka1. Les gens d’ici les appellent pompeusement : le Niagara d’Europe. Elles sont très belles, mais elles ne ressemblent en rien aux célèbres chutes d’Amérique. Ce n’est nullement, comme là-bas, la tombée verticale d’un lac entier, mais une suite de cascades en gradins d’une si parfaite régularité qu’on les croirait taillés par un architecte versaillais. Je ne suis pas très curieux de ces accidents de la nature, non plus que de cette sauvagerie pré-romantique que chérissaient les graveurs de la fin du xvuis siècle : je veux parler des belles planches de Cassas et Réville qui ont visité la Dalmatie vers 1790. Mais je suis émerveillé par le paysage qu’on découvre en descendant 1. Prononcer Keurka, en faisant rouler l’r.