DE SARAJEVO A MOSTAR, ET RETOUR 2(55 en criant : Dobar dân! On nous accueille avec des poignées de mains, on nous entraîne dans le cabaret, on nous fait la meilleure place sur le divan, on nous offre des cigarettes, des fruits, des gâteaux de miel, et l’on recommence à nous raconter des histoires. Il faut dire que nous ne les comprenons pas toujours, car elles sont subtiles et ramassées, mais celui qui les conte a une figure si drôle que nous rions tout de même. En voici une prise au hasard : Ali vient demander à Moustafa de lui prêter son âne. «Hélas! répond Moustafa, je l’ai déjà prêté.» A ce moment, on entend l’âne braire dans l’écurie. « Tu as menti, fait Ali, ton âne est dans l’écurie. » — « C’est possible, réplique l’autre, mais je ne te le prêterai tout de même pas, car tu n’es pas un vrai ami : tu crois mon âne et tu ne me crois pas, moi! » Il en est de beaucoup moins convenables, car la gaudriole est de tous les pays, il en est même de si vertes qu’on me les a dites à l’oreille. Mais je n’ai rien compris, car Marie-Jeanne n’était pas là pour me les traduire. La dernière fois que nous sommes passés à Kônjitz nous leur avons dit en les quittant : —• Nous ne reviendrons plus... Ils n’en ont pas cru un mot, ils se sont tous mis à rire. En arrivant à la crête du pont, je les voyais dans le rétroviseur nous faire de grands gestes d’au revoir. Mais je n’avais pas envie de rire... Jusqu’à Yablanitza la vallée est grande ouverte et la route excellente. Elle passe sous de majestueux noyers dont le feuillage ciré la recouvre à toucher le toit de la voiture. Un beau paysage de France, avec de temps