TETOVO ET GOSTIVAR 165 doute pour le même prix. Nous mangeons un peu de tout, au hasard de la fourchette. Un monsieur qui doit être le patron de la guinguette vient nous demander si nous sommes contents. Marie-Jeanne s’émerveille : — Tu connais un bistro où on nous traiterait comme ça? Le kolo se déroule sous les arbres, entre les tables. C’est un cabaret où l’on s’amuse. Une bonne partie de la clientèle est ivre, cette saoulerie serbe, hilare, extravagante, mais inébranlable. Au bout d’une heure un petit groupe s’approche de nous et sollicite « l’honneur de nous présenter le fiancé »... C’est ainsi que nous apprenons que nous sommes dans le jardin d’un particulier et qu’on y fête les fiançailles du fils aîné. On a trouvé tout naturel de nous voir entrer là, nous asseoir et demander à manger. Nous sommes des hôtes envoyés par le Gospodîn. Sa bénédiction est entrée avec nous. Je m’émerveille à mon tour : — Tu connais un pays où on nous recevrait comme ça? C’est ici la maison du fiancé, les parents, les amis du fiancé. Une autre fête, dans un autre quartier, réunit les parents, les amis de la fiancée. C’est chez elle qu’aura lieu le dîner de famille, les pères et mères, les grands-parents, les frères et sœurs, et le pope. On nous prie « de bien vouloir honorer de notre présence le festin ». Je m’excuse sur ma toilette : je n’ai qu’un pantalon de toile, une chemise à manches courtes et les pieds nus dans des sandales. — Aucune importance... Vous êtes nos hôtes. Ils ne savent même pas d’où nous venons, comment nous sommes arrivés là, à plus forte raison qui nous