LES FAUTES TACTIQUES 215 continué à lancer contre la grande forteresse occupée par les Turcs les plus sanglants assauts! Alors que l’ennemi disposait de nombreuses routes, lai amenant effectifs, vivres et munitions, alors qu’il possédait la liberté de manœuvre, nous-mêmes recevions — au prix de combien d’efforts — notre ravitaillement et nous trouvions en réalité assiégés par les troupes ottomanes, avec menace d’être jetés chaque jour à la mer! Les partisans de l’attaque par la presqu’île de Gallipoli répondront : « L’opération par la voie de terre était indispensable pour faire tomber les forts des Dardanelles et permettre à la flotte de passer! » C’est juste! Mais un plus sûr résultat aurait été atteint, en attaquant l’isthme de Boulaïr, large seulement de 4 kilomètres et mal défendu par trois forts démodés : Napoléon, Sultan et Victoria. De ce côté, le terrain est peu montagneux, et quoi qu’on ait dit dans la presse, la côte est facilement abordable. Les cartes dressées par l’amirauté anglaise, bien avant la guerre, accusent des profondeurs d’eau suffisantes jusqu’à la côte (1). Je ne saurais prétendre qu’un débarquement heureux aurait eu pour résultat d’« embouteiller » les Turcs dans la presqu’île de Gallipoli. Mais, menacés d’embouteillage, ils auraient dégarni en partie le sud de la presqu’île et auraient porté le plus gros de leurs efforts vers le secteur menacé, c’est-à-dire vers l’isthme de Boulaïr. Les escadres franco-britanniques auraient donc pu essayer, avec quelques chances de succès, de forcer à nouveau le (1) 11 est facile de vérifier cette opinion, en consultant la carte de Gallipoli et du golfe de Saros, établie par M. Forest, éditeur géographe, 17, rue de Buci, Paris.