LE CÔTÉ MILITAIRE DE LA QUESTION D’ORIENT 95 impeccable. En passant devant le sultan, et sur un signe de l’officier commandant chaque unité, les hommes accentuent le pas dit « de parade. » Je remarque quelques chefs de section — des fumistes sans doute, désireux d’obtenir de l’avancement — qui exagèrent le mouvement de façon ridicule. L’assistance applaudit ces marques de bonne volonté. Après l’infanterie, la cavalerie défile au trot. Elle ne donne pas l’impression d’une troupe pouvant rivaliser avec les cavaleries européennes. Les chevaux — des hongrois — semblent médiocres. Quant aux cavaliers ils montent solidement mais lourdement, prenant un appui trop brutal sur la rêne de bride. Par contre l’artillerie se présente dans un ordre parfait, ses canons et ses caissons remarquablement alignés. Les autres officiers français restaient dans le même étonnement que moi-même. L’allure impeccable de l’infanterie turque, défilant après deux heures d’attente passées sac au dos, nous laissait rêveurs, et cette revue m’a servi à comprendre la résistance et la discipline du soldat ottoman tant vanté dans l’histoire et aussi tant contesté en France, parce qu’il avait subi les défaites de Thrace. On peut m’objecter : une revue ne constitue pas un critérium absolu pour juger une armée? En effet! mais c’est tout au moins un indice à no pas négliger ! Encore une remarque : les troupes que je vis défiler étaient fort bien équipées. Il en était de même pour les corps d’Europe et pour ceux placés sur la côte d’Asie. De tout cela, il faut conclure que la mission Sanders n’avait pas perdu son temps. Les bons emprunts français s’étaient transformés en fusils, en canons et en habits neufs.