146 LA FRANCE ET LA TURQUIE France envers leur pays malheureux. Une crise de xénophobie s’est de nouveau produite, comme au moment de la révolution de Salonique. Elle a excepté les Allemands, devenus les sauveurs del'Empire. Les Turcs refusaient de mourir! On leur déniait l’idée de Patrie, en reprochant à leur nation d’être une mosaïque de races. Ils ne voulaient point l’admettre. Il existe, répondaient-ils, dix millions d’Otto-mans qui représentent une nation autochtone animée d’un sentiment national très élevé. La classe éclairée n’a jamais desespéré de refaire une grande Turquie. Il y a dans ce désir du rêve, mais aussi de la foi ! Pourquoi ne pas l’avoir reconnu, alors qu’il en était encore temps? C’est donc beaucoup par notre faute qu’une hostilité sourde, mais cependant réelle, s’est manifestée peu à peu contre la France, aussi bien dans la population civile que dans l’armée. On s’est désaffectionné de notre pays, mais sans le montrer ouvertement et, prenant pour sincères les compliments, qu’avec une politesse tout orientale on continuait à leur adresser, nos compatriotes ont mal jugé, sur place, la situation. 11 fallait un très gros effort pour sauver la Turquie. Nous avons refusé de voir et d’entendre! Nous n’avons pas compris que notre pays perdait là-bas son grand prestige. Nous admettions très bien que Cons-tantinople revînt aux Russes et que la majorité des territoires asiatiques fût attribuée aux puissances européennes. Pourquoi donc tant nous indignerau-jourd’hui au sujet de la Turquie? Celle-ci, moralement abandonnée par sa vieille amie, la France, s’est retournée vers l’Allemagne qui lui promettait le salut! Nous avons cru la Turquie morte. Elle avait, sous la