oO LIVRE PREMIER. ni les passions de leurs ancêtres. Trop peu aguerrie, trop effrayée des maux de la guerre, toute la population désirait éviter un siège, qui était cependant le seul moyen de sauver la patrie. Le gouvernement renonça à la résistance, et fit avec Bonaparte un traite en vertu duquel le Grand Conseil devait abdiquer la souveraineté, un gouvernement provisoire être nommé, la ville occupée momentanément par les Français. Par des articles secrets, Venise s’engageait à faire avec la France des échanges de territoire, à lui payer quelques millions, à lui céder des vaisseaux, des tableaux, des manuscrits. Ce traité indique bien que Bonaparte ne songeait point encore à livrer Venise, et, une fois ratifié par le Directoire, il la sauvait. Mais, pendant qu’on le signait à Milan, une révolution éclatait à Venise, le gouvernement cédait aux factieux, l’aristocratie abdiquait, on admettait sans condition les troupes françaises, et l’état se trouvait livré à discrétion. Le manque d’énergie, l’absence de toute vertu guerrière, et par-dessus tout le triomphe de la démagogie, avaient conduit Venise à l’abîme. Le gouvernement provisoire qui s’établit ne fut pas reconnu par les provinces, dont les antiques rivalités se réveillèrent, et chacune se constitua séparément. Tout le pays se trouva dans la plus triste situation, en proie à l’incertitude, aux inimitiés réciproques et à un sentiment général de mal-être qui faisait tout à la fois désirer un changement et prévoir une catastrophe. Le peuple, aveuglé par les démagogues, se livrait à toutes sortes d’excès et détruisait les emblèmes d’un passé si grand et si heureux, qu’on lui disait être des emblèmes de tyrannie. Ce lut Bonaparte que le Directoire chargea de négocier la paix avec l’Autriche, et celle circonstance