204 LIVRE QUATRIÈME. employaient surtout des boulets. 11 est vrai qu’ils tiraient aussi à boulets rouges; mais pour que ce tir soit réellement efficace comme moyen incendiaire, il faut que les boulets soient portés à un très-haut degré de chaleur que l’on ne peut guère produire sans des appareils particuliers, des fours à réverbère, dont les batteries de l’assiégeant n’étaient pas pourvues. Dans les vingt-quatre jours que dura le bombardement, du 29 juillet au 22 août, Venise reçut 25 mille projectiles, à peu près mille par jour. Il n’y eut cependant que 7 personnes de tuées et une trentaine de blessées. Les projectiles n’avaient pas une grande vitesse en s’abattant sur la ville ; ceux qui frappaient les murs n’y laissaient que de légères traces, et ceux qui tombaient sur les troits traversaient rarement plus de deux étages. Les incendies étaient assez fréquents, mais facilement éteints, car le feu mis ainsi est lent à se développer. Une maison et une église furent seules la proie des flammes. Tous les palais , tous les monuments, chefs-d’œuvre d’architecture remplis de chefs-d’œu-vre de peinture el de sculpture, échappèrent à la destruction et à la dévastation, et ne reçurent presque aucuns dommages. Mais cela n’excuse pas les Autrichiens d’avoir prolongé pendant vingt-quatre jours le bombardement, au risque d’anéantir tant d’admirables productions du génie humain et de faire un monceau de ruines d’une ville qui ne pouvait plus leur résister longtemps, el qu’ils avaient intérêt à ménager puisqu’elle leur appartenait. Le droit de la guerre a ses limites, el les circonstances n’étaient pas de nature à justifier un procédé barbare que la certitude et un besoin pressant du succès peuvent seuls autoriser; il importait fort peu aux Autrichiens