20 LIVRE PREMIER. et par mer, et ses montagnes rendaient fort difficiles scs communications terrestres, tandis que Venise, inabordable de tous côtés, mais se trouvant à l'embouchure de plusieurs fleuves navigables, pénétrait commodément dans le continent. Les deux républiques différaient entièrement sous le rapport politique ; la sage Venise ne cessait de perfectionner sans secousse son gouvernement aristocratique; Gênes , au contraire, avait déjà passé plusieurs fois de l’oligarchie à la démocratie, et même de l’indépendance à la servitude; mais elle était encore pleine de cette vigueur passagère des états démocratiques. La puissance de ces deux villes célèbres était alors à peu près égale; toutes deux entretenaient une nombreuse marine, avaient des colonies considérables et des comptoirs importants. La jalousie du commerce leur met les armes à la main l’une contre l’autre au commencement du xme siècle. Elles luttent avec acharnement et courent toutes deux de grands dangers. De nombreuses batailles, la destruction de plusieurs flottes, ne les arrêtent point et ne peuvent éteindre leur haine mutuelle. Ces deux implacables rivales ensanglantent la Méditerranée et ¡’Adriatique, et se battent jusque sous les murs de Constantinople ; elles ne font jamais la paix et concluent seulement des trêves. Ce n’est qu’au bout de deux siècles qu’elles renoncent à s’entre-détruire. Pendant tout le cours de ces guerres, leur caractère ne se dément pas. Dans la défaite, Gênes, état démocratique, désespère vite d’clle-mème; mais plutôt que de renoncer à sa haine et à la vengeance, elle se donne à l’étranger, et va rechercher dans la servitude les moyens de vaincre sa rivale. Venise, état aristocratique, fait preuve dans l’adversité de con-