70 LIVRE DEUXIÈME. sa faveur; et l’Italie, dans la conquête de son indépendance, œuvre ordinairement si difficile et si périlleuse, ne semblait pas avoir à faire de longs efforts, à subir ces pénibles épreuves imposées aux grands desseins. Mais il fallait pour cela qu'elle se montrât digne des prodiges que la fortune venait de faire pour elle. Les événements ne sont que le résultat de la conduite des affaires ; ils tournent bien ou mal, selon que celles-ci sont bien ou mal dirigées. L’Italie ne lit que des fautes; les hommes que le hasard ou le caprice populaire venait de porter au pouvoir, à Venise et â Milan, n’étaient pas à la hauteur de leur tâche; ils gâtèrent bien vile la situation, et leurs mains debiles laissèrent périr une œuvre si heureusement commencée, des espérances si bien fondées. L’ame du gouvernement que Venise venait de se donner était Manin. Jusqu’à la fin de 1847, il n’était connu que pour un avocat de talent, et c’était alors seulement qu’il était entré dans la politique, en élevant la voix contre la conduite du cabinet de Vienne envers l’Italie, et en demandant des réformes. Sa démarche n’avait rien de séditieux ni d’illégal; cependant on l’avait mis en prison, dans le but d’intimider et de comprimer le sentiment national qui commençait à se faire jour de tous côtés. Celte rigueur déplacée n’avait servi qu’à lui donner de la popularité, en le faisant passer, aux yeux de la multitude, pour une victime de la tyrannie, un martyr de la liberté. Aussi, bien que son rôle dans la libération de Venise n’eût été que secondaire, ce fui lui qui recueillit lousles fruits de la victoire, qui devint le héros de l’insurrection et le chef du nouveau gouvernement. Mais s’il est souvent facile d’arriver