LIVRE PREMIER. 'J le spectacle d’une telle ville aux prises avec l’Autriche n’aurait pas manqué d’exciter un mouvement et d’éveiller des sympathies semblables à celles de 1827 pour la Grèce. Mais les temps sont trop mauvais, la révolution de février et les folies barbares qu’elle a enfantées partout ont fait mettre de côté toute idée généreuse; l’Europe a bien autre chose à faire qu’à s’occuper de Venise, et cette ville infortunée s’est U’ouvée abandonnée à elle-même. L’Adriatique, cette mer qui n’est qu’un grand golfe de la Méditerranée, reçoit à son extrémité occidentale les nombreux fleuves qui descendent des Alpes et sillonnent la Ilautc-Italie; les alluvions de ces fleuves, arrêtées à leur embouchure par l’action de la mer, se rangent en longs bancs parallèles au rivage, séparent une partie des eaux fluviales de celles de la nier, et forment ainsi des flaques d’eau, des petits lacs parsemés d’îles, de bas-fonds et de marais, et auxquels on donne le nom de lagunes. Les plus remarquables de ces lagunes sont celles de Venise, qui s’étendent des bouches de la Piave à celles de la Brenla et de l’Adige. Leur forme est celle d’une demi-ellipse allongée, dont l’arc s’appuie à la terre ferme, et dont le diamètre, formé par une étroite bande de sable, arrête les eaux de la mer. Leur longueur est d’environ GO kilomètres, leur plus grande largeur de 13. Au centre, s’élève Venise, sur un archipel de petites îles réunies par des ponts ou communiquant par des canaux qui forment les rues de cette ville bizarre. Elle n’est pas le seul point habité ni même la seule ville des lagunes; la bande de sable qui forme le littoral, les nombreux îlols qui surgissent de ce territoire d’eau et de marais, ont aussi des habitants. Les principaux