- 88 - grisâtres qui interceptent les lueurs du jour’'finissant, face à une muraille formidable, ravinée, dont nous suivrons la droite jusqu’au port de Cattaro, si petit sous la masse noire des rochers qui le surplombent. Au bas, sur la berge à peine suffisante, la file de maisons claires, minuscules aussi, posées de distance en distance comme des jouets de Venise, n’a pas l’air de servir à des êtres vivants. Pas plus que les campaniles accrochés aux anfractuosités, elle ne réussît à mettre une note légère sur ce décor écrasant. L’ombre et le mystère planent. Il est huit heures quand nous accostons à 1111 appontement désert. Sur les baies, au long des gorges, des hauteurs, les cloches, tout à côup, sonnent à pleine volée, annonciatrices de Pâques; c’est un frisson d’horreur sacrée; on se tait. La nuit s’épaissit; pas une lumière dans la ville; à quoi bon descendre, puisque le Gondollo ne reprendra son voyage que demain. Nous devisons sur l’impression de recueillement qu’on éprouve malgré soi au fond de ces trous où la lumière est plus rare. Le commissaire compte qu’il y a dans les environs un village autour duquel sont disposées de telle façon les montagnes, que ses habitants ne voient jamais le soleil. Chaque année, au 24 juin, la tradition exige qu’enfants cl grandes personnes