— 480 — dre de Malte, débuta comme garde-marine en 1743, fut nommé enseigne en 1748, fut pris par les Anglais au combat de Belle-Ile et libéré par la paix d’Aix-la-Chapelle. Il fit partie de l’escadre de l’amiral la Galissonnière devant Port-Mahon, devint capitaine de frégate en 1767, et capitaine de vaisseau en 1772. Il fit avec ce grade toute la campagne de l’indépendance dans les eaux américaines et se fit remarquer tant par sa valeur professionnelle que par les vues élevées et les idées profondes qu’il possédait sur la guerre maritime et qui sont développées dans sa correspondance. En 17S1 il partit pour l’Inde à la tête d’une division de cinq vaisseaux et mit le sceau à sa réputation dans cette célèbre campagne marquée par le combat de la Praya, aux îles du Cap Vert et les cinq rencontres glorieuses qu’il eut avec l’amiral anglais Hughes. La paix de Versailles signée en 1783 interrompit ses succès et il rentra en France. Comblé d’hon-neuns, ayant reçu des témoignages d’estime des Anglais à son passage au Cap de Bonne-Espérance il mourut en 1788, non pas en duel comme on l’a dit, mais d’une congestion, au moment où il allait réunir toutes les forces maritimes de la France pour une nouvelle campagne. Suffren est surtout hors de pair comme stratégis-te. Avant lui les amiraux français, qui avaient perdu les bonnes traditions de Duquesne et de Tourvil-le,faisaient consister la guerre navale en expéditions dirigées contre certains points du territoire ennemi. Si l’on rencontrait la flotte adverse, on ne cherchait pas une action décisive, on voulait conserver avant tout sa propre flotte et l’on s’estimait heureux si l’on ne perdait aucun vaisseau. Excellents manoeuvriers, les amiraux de cette époque avaient porté à l’extrême la perfection des évolutions, mais ils avaient fini par considérer la manoeuvre elle-même comme le but final, et non comme un moyen d’y parvenir. C’était, sur mer, le pendant de la doctrine de guerre dite « de positions » dont Napoléon devait également faire justice quelques années plus tard.