CONCLUSION. 307 moulins à vapeur *, ou d’autres établissements industriels, amènerait un peu de civilisation; il n’ose passer outre à l’opposition systématique des beys, partisans résolus de ce qui a toujours été, adversaires d’un changement, hostiles à l’ouverture du pays aux étrangers, méprisant le commerce, redoutant de voir les raïas s’enrichir. La situation des chrétiens est, on le voit, peu enviable. La force vitale du pays est dans les montagnes dont les habitants ont vécu libres, et en imposent aux musulmans. L’arbre de ce côté est encore vigoureux, mais la sève ne peut y circuler librement. Enclavés entre des pays pratiquant une autre religion et de races différentes,Monténégro et Grèce, populations dont ils n’ont rien à espérer, avec lesquelles ils ont toujours mal vécu, car le fanatisme religieux et les aspirations politiques ont créé entre eux une inimitié que le temps n’a pas affaiblie, alors que ces voisins ont eu et ont encore de puissants protecteurs, les Albanais sont absolument isolés, et peuvent avec raison penser quele malheur poursuit l’homme solitaire. Ils ont, en outre, l’infortune d’être eux-mêmes intérieurement déchirés par des hostilités religieuses d’autant plus vivaces, qu’ils sont de même race, musulmans, catholiques, orthodoxes parlant la même langue, ayant la même origine, sont des frères; mais des frères ennemis; aveuglés par des rancunes confessionnelles, ils ne comprennent pas tout le mal que leur a causé leur manque de cohésion ; ils n’ont donné aucune preuve 1. La farine destinée aux troupes vient de Salonique par San Giovanni di Medoa ; l’hiver il est souvent difficile de l’apporter en ville, parfois impossible durant plusieurs jours. Les Albanais ne mangent que du pain de maïs. Le pain blanc ou à peu près blanc, consommé par les quelques étrangers établis ou de passage, est fabriqué avec de la farine de Trieste.