38 SOUVENIRS DE LA HAUTE-ALBANIE. cette joie, quand les parents qu!ils représentent pleurent leur lille partie ; elle avance sans voir, on lui prend les pieds pour les diriger quand on lui fait monter l’escalier, seules ses marraines l’ont accompagnée et fait asseoir dans la pièce d’honneur où l’attendaient les parents et les amis de son mari, on lui enlève ses bottines pour lui mettre aux pieds les babouches qu’on portait devant elle ; les marraines, après avoir bu les sirops et le café qu’on leur offre à genoux, enlèvent les voiles de la mariée et prennent congé d’elle, la laissant seule dans sa nouvelle famille. Il est midi, dans chaque pièce on place à terre d’immenses plateaux de cuivre couverts de mets, le vin et l’eau-de-vie circulent aussi abondamment du côté des femmes que de celui des hommes, placés suivant l’usage oriental dans des chambres séparées. La mariée ne bouge ni ne mange ; de temps à autre, si elle le demande, une femme lui apporte un verre d’eau ou une tasse de café qu’elle boit en hâte, cachée par une étoffe de soie derrière laquelle on l’abrite. On a l’impression d’un oiseau effaré, mis dans une cage. Après le repas, la musique et les chants recommencent et continuent, jusqu’au soir. A onze heures la mariée est conduite dans la chambre qui lui est destinée et couchée à demi vêtue, je ne puis dire mise au lit, car les Albanais dorment sur des matelas mis à terre. Les témoins du mari, qui depuis l’église ne s’est pas approché de sa femme et a passé sa journée à boire avec ses amis, le prennent et malgré la résistance qu’il doit feindre de leur opposer, le poussent dans la pièce où elle se trouve ; elle peut refuser de le recevoir, mais cette résistance ne saurait se prolonger plus de trois jours. Le lendemain du mariage, une amie de la famille vient